Le soleil se couche sur le ciel texan. L'automne est bel et bien arrivé, et avec lui ses couleurs chaudes, sa brise légère, ses écharpes ressorties des placards et ses fêtes en préparation. La fin de l'année annonce toujours des changements, des fêtes, des activités par-ci par-là qui te sort du quotidien. Les yeux fixés sur la grande horloge de l'entrée, tu fais les cent pas. Tout est allé à la fois si rapidement, et si lentement. Des années que tu attends, une éternité, presque. Tu souffles en marmonnant dans ta barbe, remettant en place une mèche de cheveux. T'as le cœur qui bat bien trop vite, et des nœuds qui se forment au creux même de ton ventre. T'es stressée, aussi simple que ça. Pourtant tu connais la pression. Avec un enfant à charge, une maison à entretenir, un mari à satisfaire, et une vie à côté à essayer de reformer, tu t'y connais un peu en pression. Mais tout est si différent. Un coup de fil à ton jumeau, pour être sûr encore une fois. Suivre le plan, qu'il te dit. Tu lèves les yeux au ciel, détestant cette situation. Tu n'as aucune maîtrise sur celle-ci, aucune idée de son dénouement, de comment tout ceci va se passer. Et plus que tout tu détestes ça, tu as besoin d'avoir un certain contrôle sur ta vie, sur ce qui t'entoure, sinon tu perds pieds. Autant dire qu'en ce moment, t'as l'impression de te noyer constamment. Bloquée dans de l'eau froide, sans porte de sortie. Comme au milieu d'un océan que tu n'as pas envie de traverser, de découvrir, pour pouvoir t'en sortir. Tu aimerais juste la solution, la porte de sortie. Sans attendre. Tu souffles une nouvelle fois, t'arrêtant finalement. Tu entends des pas à l'entrée, et la porte qui s'ouvre. Les yeux rivés sur ton époux, si tu peux encore le qualifier comme tel. Tu gardes un air neutre, sans montrer à quel point tu peux être bouleversée, autant par lui que par la vie en général. Tu cries le nom de ton fils, qui descend les escaliers pour embrasser son père. Il passera toute cette semaine avec lui, dans son nouvel appartement dans le centre de Dallas. Loin de toi. Ton coeur se serre en embrassant ton fils, avant de la voir partir avec l'homme qui a longtemps partagé ta vie. "Et merde." Tu grognes pour toi-même. Le silence alourdissant autour de toi. Tu n'auras pas le temps d'en être spectatrice, parce que tu as un plan à mettre à exécution. Tu crierais sûrement, si tu n'avais pas un minimum de retenue. Manteau sur les épaules, foulard autour du coup, tu montes dans ta voiture. Tu roules une vingtaine de minutes, peut-être plus, peut-être moins, avant d'atterrir dans le sud de la ville. Tu restes dans la voiture un nombre assez conséquent de minutes. Regard dans la classe. Peau de porcelaine, boucles parfaitement en place, maquillage discret qui révèle une certaine beauté. T'as pas vraiment changé, et pourtant tellement en même temps. Tu te décides finalement à sortir de la voiture. Porte qui claque derrière toi. Tu relis une dernière fois le numéro inscrit sur le papier que tu tiens entre tes mains. C'est ici qu'elle est : ta soeur. Ta petite soeur, absente pendant si longtemps de ta vie. Introuvable, encore et encore, jusqu'à ce qu'un détective privée retrouve enfin sa trace. Ici même, dans le sud de Dallas. Tes mains tremblent un peu, t'essaies de les calmer. Tu t'approches de la porte, que tu fixes quelques secondes, avant de sonner. Tu n'as aucun plan. T'aimerais pourtant, ce serait plus facile à vivre, mais ton seul plan, c'était de retrouver ta soeur. Et maintenant que c'est fait, tu n'as aucune idée de comment se passera le reste.